Néna in tacon domoune la marque nout zistoir La Réunion, entre autres Madame Visnelda ! Beaucoup i souvien que navé la queue devant son caz pou in remède guérison ! Jules que la connu à elle dans son zeune temps i partaze a nou un ti zistoir la arrive a li ek un dalon.
Mais qui est Madame Visnelda ?
Jeanne-Paule Visnelda née Honorine de parents réunionnais, est originaire de Diego-Suarez. Elle apprend à connaître les plantes et leurs vertus médicinales auprès de sa grand-mère, Marie-Amédée. Son père, qui connaît aussi les secrets des plantes, lui transmet son savoir également. Curieuse, elle apprend aussi beaucoup auprès de Monsieur Bothard, botaniste à Saint-Gilles et devient comme on les appelle familièrement dans l’île : une tisaneuse.


Sa vie bascule à 18 ans
Jeanne-Paule Visnelda perd sa mère qui décède brutalement de violents maux d’estomac. Suivra son père 18 mois plus tard. Elle se retrouve seule pour subvenir aux besoins de ses cinq frères et sœurs. A la fois orpheline et chef de famille, elle réussit à poursuivre une formation de sténodactylo qui lui permet de devenir agent communal à Saint-Louis, puis à L’Etang-Salé, commune où son père avait créé une saline. D’études en examens, elle monte les échelons et devient la première femme secrétaire général de mairie à La Réunion, jusqu’à sa retraite en 1984.
La révélation de son don
C’est en 1952 que Jeanne-Paule Visnelda a la révélation du don qu’elle possède. Malade, elle entend une voix qui lui enjoint de se guérir seule, avec des plantes, puis de guérir les autres. Très vite, par le bouche à oreille, le don de Jeanne-Paule Visnelda est connu à travers toute l’île. C’est ainsi que pendant presque trente ans, elle reçoit des milliers de malades gratuitement, les soignant par des tisanes, l’imposition des mains et des prières. Parmi ceux qui viennent la voir, beaucoup de malades imaginaires, esprits sensibles sur lesquels cette médecine parallèle fait effet.


Les malades affluent, une histoire sympathique
« C’était il y a longtemps ». « Mon confrère Alain Lemée, avec qui je bossais à Télé 7, devait recevoir une consoeur d’un grand magazine voulant effectuer un reportage sur Madame Visnelda. Il m’a demandé mon soutien vu que je connaissais cette dame de longue date. Un matin donc, nous voilà partis pour L’Etang-Salé. Il y avait une foule de « patients » devant le dancing de Madame Visnelda. Laquelle n’a été que trop heureuse « d’agir » devant la journaliste venue de France exprès pour elle. Car la guérisseuse a toujours soigné son image », raconte Jules.
Pile-poil, une famille désespérée venait soumettre une des leurs aux bons soins de la Visnelda, une pauvre fille « envoûtée » totalement absente, baragouinant des phrases incompréhensibles et secouée par intermittences de rires fous.
Réaction immédiate de Visnelda :
« Ah !!! Elle est possédée par l’âme de Sitarane ».
La pauvre « possédée » se dandinait d’un pied sur l’autre, soulevant parfois les plis de sa pauvre robe, exhibant ses parties en ricanant. Et surtout, continuant de « parler » en patagon.
« Voyez ! Regardez ! S’est écriée une Visnelda triomphante. Elle danse le salégy (ndlr : danse malgache semblable à notre séga). Elle parle en malgache… Sitarane la possède… Ah ! Ce Joseph Sitarane, il va falloir l’en débarrasser… ».
« J’étais déjà convaincu d’avoir affaire à un imposteur mais là, j’en fus définitivement persuadé et pour plusieurs raisons » renchérit Jules :
1. Sitarane ne s’est jamais prénommé « Joseph ». Son vrai nom était Simicoundza Simicourba.
2. Sitarane n’était pas plus malgache que vous et moi : il venait du Mozambique en qualité d’engagé volontaire.
3. Sitarane n’a jamais été le sorcier que dépeignent les légendes. Le seul vrai sorcier de la bande était Pierre-Elie Calendrin, auto-surnommé « Saint-Ange ».
(Bref, c’est mon opinion mais en regardant autour de moi, je voyais l’émerveillement dans la salle).
A grands coups d’eau salée dans les yeux et d’impositions des mains, Madame Visnelda a réussi à calmer cette pauvre fille.


« Elle avait sans conteste une très forte personnalité psychique et savait mettre ses « patients » en état de confiance. Elle avait une voix très douce en s’adressant aux malheureux mis en sa présence. Certains appelleront ça du « transfert » mais je réfute la psychanalyse », explique Jules.
« Je pense que Visnelda était d’une forte sensibilité, ce qui lui permettait de « sentir » l’autre. Et comme elle aimait les gens, elle avait trouvé ce cinéma pour leur venir en aide, tout en tenant compte du surnaturel auquel le Réunionnais est naturellement sensible ».
Epuisée par le travail, minée par le diabète, Jeanne-Paule Visnelda s’éteint au centre hospitalier de Saint-Pierre le 15 août 1991, jour de la grande fête catholique de l’Assomption qui commémore la montée au ciel de la mère du Christ, la Vierge Marie. À sa mort, plusieurs milliers de personnes l’accompagnent au cimetière d’Étang-Salé.
A la base, chacun ses croyances, ses pensées, ses pratiques, ses superstitions, c’est cela qui fait le charme de La Réunion et de son naturel sensible.